7èmes ASSISES NATIONALES

Palais du Luxembourg

20 mars 2015

SONY DSCCes 7 èmes Assises de la FNCD « Ethique et intelligence économique » ont débuté par l’introduction du Président, Guy SALZIGER, remerciant les participants et les intervenants de leur présence. Il  fait part de ses bons espoirs quant au rayonnement de la FNCD en rappelant ses objectifs de contribuer à refonder le dialogue social et de promouvoir sa charte de déontologie avec ses 8 valeurs toujours d’actualité. Ensuite, il brosse  un rapide tour d’horizon sur les actions de la FNCD depuis les Assises 2014 :

Le baromètre social annuel des Cadres dirigeants de la FNCD révèle que 90% des sondés sont heureux d’aller au travail malgré quelques soucis liés aux NTIC. Les priorités des sondés sont le maintien des compétences, la rémunération et l’évolution de carrière. La seule ombre au tableau concerne les relations avec les instances de gouvernance où plus de confiance et d’autonomie dans la prise de décision sont souhaitées.

Le combat de la FNCD sur la représentativité avec un collège électoral des cadres dirigeants se poursuit avec  sa contribution en novembre 2014 sur le bilan de la loi de 2008 : mesures d’audience spécifique aux cadres dirigeants, prise en compte de plusieurs conventions collectives, reconnaissance de la FNCD comme confédération.

En juin 2014, la FNCD a été reçue au Ministère du travail et a fait part du souhait de participer à des groupes de travail (notamment sur les Risques Psycho-Sociaux) et d’être auditée par rapport à sa contribution au bilan de la loi de 2008. Pour la FNCD les aménagements demandés doivent aider la démocratie sociale. Michel SAPIN s’était même engagé à examiner le sujet suite à l’amendement CHERPION.

Information récente : un entretien avec Marguerite MOLEUX, Directrice de cabinet de François REBSAMEN, est prévu pour le 28 mai 2015.

En mars 2015, une note technique a été envoyée à 7 sénateurs pour de nouveaux amendements dans le cadre de la loi Croissance et activité (dite loi MACRON).

 Information récente : Isabelle DEBRE, Vice-présidente du Sénat, a répondu positivement, précisant qu’elle allait porter nos propositions.

 Enfin, l’ouverture à d’autres réseaux pour renforcer la FNCD demeure un objectif permanent pour son rayonnement.

« Point n’est besoin d’espérer pour entreprendre ni de réussir pour persévérer » (Guillaume 1er d’Orange-Nassau) conclut Guy SALZIGER.

Intelligence économique : responsabilité des décideurs :

Dans son propos introductif, Norbert TANGY, Président de la Fédération Nationale des Cadres Supérieurs de l’Electricité et du Gaz (FNCSEG), nous explique que nous sommes dans une société non seulement de droits mais aussi de régulation, via des pratiques telles que les codes, la déontologie, les règles d’usage etc… et précise quelques éléments de contexte : le « bas de la pyramide », le nouveau marché  (associé au Big Data) échappe de plus en plus aux très grandes entreprises, notre pays peine à prendre le virage de l’intelligence économique par insuffisance des ressources dans les entreprises avec des dirigeants d’entreprises parfois éloignés du terrain des opérations.

SONY DSCBrigitte DUMONT, Directrice Responsabilité sociale d’entreprise du Groupe Orange et vice-présidente déléguée de l’ANDRH, intervient ensuite en soulignant d’abord le rôle des femmes qui est à développer. Elle précise qu’à l’heure du numérique on entre dans une société de l’information qui bouscule les repères. Tout change : les modes classiques pyramidaux de pouvoir, les façons de communiquer, les liens avec autrui. L’accès au savoir et à la culture est bousculé également ainsi que les modes de production.

Le sujet touche donc la vie civile en général. Il s’agit d’une révolution qui nous interpelle. Comment l’accompagner et aller au bout ? A Orange, le numérique est un des éléments pour faire évoluer les comportements. C’est un outil de développement socio-économique et un catalyseur d’innovation au service de tous. Orange, opérateur citoyen s’engage dans la révolution numérique, source de progrès pour que chacun en tire bénéfice. Ses produits et services sont au cœur de cette révolution car adressés à tous, y compris aux clients précaires. Il s’agit aussi d’inclusion via les offres d’accessibilité avec l’exemple du handicap pour lequel le numérique permet l’intégration. Il faut donc toujours plus d’innovations et de transformations.

Il faut aussi avoir la certitude de l’impact positif des activités ou au moins minimiser leurs impacts négatifs : comment travailler ensemble sur le partage de création de valeur, être en adéquation avec les parties prenantes, guider chacun en confiance ?

Des comportements exemplaires sont donc à développer comme la charte de déontologie développée chez Orange : relations entre collègues, avec les écosystèmes, compréhension sur la gestion des conflits d’intérêts, capacité à répondre aux questions qui peuvent se poser, points de repères…

En 2012, une politique interne dans le cadre de la compliance a été portée pour alerter les collaborateurs sur la lutte contre la corruption, les responsabilités et moyens à leur disposition, les solutions face à des problèmes particuliers….

Orange souhaite en outre pouvoir apporter des solutions qui vont donner à des entrepreneurs nouveaux plus de capacité pour se développer comme les incubateurs en Afrique avec le soutien aux écosystèmes locaux. En France, c’est le soutien aux entreprises de l’entrepreneuriat qui offrent services et produits au bas de la pyramide. Le soutien financier du Groupe offre de belles surprises : pépites high-tech mais aussi des réalisations comme La Ruche (espace collaboratif pour entrepreneurs sociaux) présente non seulement à Paris mais aussi en province. Cet accompagnent  socio-économique permet la redistribution de la valeur, la création d’emplois (cercle vertueux). Cette « économie intelligente », c’est aussi l’accompagnement au développement des pays où Orange est engagé comme opérateur. L’activité du Groupe doit pouvoir stimuler celle des autres. Ces « éléments de confiance » doivent permettre de développer culture et économie, mais aussi les aspects sociaux.

Un français sur deux pense que la Responsabilité Sociale d’Entreprise procède de la performance de l’entreprise. Il faut donc être attentif à ce que les activités permettent l’épanouissement des personnes, des entreprises et des territoires …

SONY DSCEnsuite, Franck DECLOQUEMENT, Expert en intelligence économique (IE) au sein du groupe Ker-Meur, Professeur à l’IRIS (Institut de Relation Internationales et Stratégiques)  présente les basiques de l’Intelligence Economique (en rappelant que la thématique de l’IE date du Moyen-Age. Depuis le rapport MARTRE en 1994, on connait la réalité peu affichée en matière de compétitivité d’entreprise (adversaires économiques, voire compétition entre alliés). En 1995 est créé un comité pour la compétitivité et la sécurité économique et en 2003 est publié le rapport CARAYON, Alain JUILLET est nommé Haut-Commissaire en charge de l’Intelligence économique jusqu’en 2009. De 2009 à 2013, c’est Olivier BUQUEN qui est à la tête de la Délégation Interministérielle à l’Intelligence Économique avant que Claude REVEL ne lui succède.

Le débat ne date donc pas d’hier.

 4 paradigmes définissent concrètement la grille de lecture de l’IE :

La guerre économique : la vision économique est issue du militaire (approche MADY). Au quotidien nous sommes sur des démarches pratiques qui se déclinent du stratégique au pratique. Sur la valeur, on tend vers le patriotisme à l’américaine (valeurs du régalien, frontières de la cellule), c’est la culture offensive où on anticipe. La stratégie, c’est le protectionnisme, la légitimité, contre l’ingérence voire l’espionnage – attention : ne pas confondre espionnage, renseignement et IE…

 La sécurité économique : l’espace de référence est déterminé par l’Etat et les pôles de compétitivité pour générer de la valeur. La vision de l’économie est sanctuarisée par des partenariats public-privé. La réalité perçue, ce sont les menaces (intrusion, vols ..), les valeurs (l’égalité, l’éthique). Ici, nous ne sommes pas dans l’offensif – cf ‘Petit traité d’ingérence économique’ – on se focalise sur des éléments d’actions conjointes pour avoir des effets globaux afin de capter les savoir-faire car les ressources principales sont les hommes.

La compétitivité économique est en référence à l’économie libérale avec ses forces, ses faiblesses, le marché offensif et défensif, la rentabilité, la veille technologique le lobbying…

La diplomatie économique ou d’influence intègre tous les autres aspects et le monde entier car la réalité est systémique. On agit en commun pour obtenir l’effet final recherché : multilatéralisme en harmonie, respect de  l’environnement, vigilance, RSE, management responsable, prisme de l’utopie et humanisme.

Enfin, l’économie de l’attention doit transformer l’IE en création de valeur : gestion des perceptions, pendant économique des opérations dites psychologiques.

Managers et leaders responsables :

SONY DSCPhilippe DETRIE présente son dernier ouvrage : ‘Manager au XXIe siècle’. Il est le Président-fondateur de la Maison du Management et fait partie de la ‘Ligue des optimistes’. Il nous présente la Maison du Management comme un lieu de rencontre, apprenant, stimulant et inspirant pour dynamiser le management.

« ‘Manager au XXIème siècle’ est un essai qui est parti d’une première constatation qui est que les managers ne sont pas bien dans leur peau. Les 3 causes principales sont : la déstabilisation, le découragement  et cela se termine par le désengagement.

On vit aujourd’hui au XXIème siècle d’énormes changements. C’est une transformation globale et radicale.

10 mouvements qui sont déjà à l’œuvre et qui n’existaient pas encore au XXème siècle ont été sélectionnés pour cet essai :

. L’accélération

. La mondialisation

. La révolution du numérique

. La financiarisation de l’économie

. L’effritement des institutions et des  idéologies existantes

. La féminisation du monde occidental

. Le développement durable

. La montée de l’émotion sur la raison

. Le vieillissement de la population

. L’émergence dans les pays riches de la qualité de vie au travail.

C était un parti pris de dire que ces 10 challenges du XXIème siècle vont bouleverser les organisations et donc le métier, la fonction de manager.

Comment un manager peut-il faire face à ces changements irréversibles et déstabilisants ?

Les organisations, qu’elles soient privées, associatives ou publiques doivent intégrer ces conséquences et ces mutations, mais pour la plupart d’entre elles, c’est se transformer pour rester pérenne. Cela devient un enjeu de management.

Le management des organisations est défini  comme l’art de créer le contexte optimal pour mettre en œuvre une stratégie, c’est également l’art d’animer une équipe pour atteindre un objectif et de permettre à chacun de ses collaborateurs de progresser.

Comment fait-on pour se transformer ?

La répartition des activités est toujours d’actualité. Nous sommes passés d’une organisation verticale, hiérarchisée à un fonctionnement beaucoup plus horizontal, fluide, qui se développe sous la forme de réseaux hétérogènes. C’est donc ‘savoir réseaux garder’, ‘réseaux créer’ même. Les traditionnels clivages entre clients, fournisseurs, partenaires et employés, ont tendance déjà à s’estomper, le management évolue vers plus d’attention portée à l’homme, au contexte et aux impacts.

Le management ne s’enseignant pas, il est confié à des élites sélectionnées sur des critères intellectuels beaucoup plus rationnels que relationnels. On privilégie le diplôme au service rendu, l’ancienneté à l’humanité.

Le manager du XXIème siècle est défini par 4 points : l’ouverture, l’agilité, la relation et la coopération.

L’ouverture, c’est la mondialisation qui nous oblige à le faire.

Dans un monde hyper connecté, l’enrichissement vient du partage de l’information auquel nous sommes tous soumis.

L’ouverture c’est aussi l’accélération du numérique (Internet), comparable à la révolution industrielle, qui elle-même va créer de la réactivité. Il faut rester connecté et s’adapter. « Un monde à haut débit impose des managers à haut crédit ».

L’agilité : pourquoi doit-on être plus agile aujourd’hui et particulièrement le manager ?

Cette accélération devenue normale implique pour le manager du XXIème siècle d’être beaucoup plus réactif et comme on ne peut plus prévoir ce qui va se passer, il doit réguler, compenser en temps réel. Il faut réduire notre distance hiérarchique avec les gens. La vision anglo-saxonne dit que le chef n’est pas l’ennemi alors qu’en France  nous sommes en logique de confrontation. Pour exister, il faut être contre. 

L’attention : aujourd’hui, au XXIème siècle, c’est le réexamen très fort des rapports de l’entreprise avec la société. De nos jours, l’enjeu pour les entreprises ce n’est plus de combattre, ce que l’on veut c’est faire évoluer le monde du travail pour mieux vivre en général. Avant, l’organisation de l’entreprise était face à son marché.

Maintenant elle est face à la société et c’est beaucoup plus large, cela veut dire qu’il y a beaucoup plus de contraintes, de partenaires. Elle doit être pollinisatrice et non destructrice.

Que peut faire le manager ? Il doit être exemplaire et crédible. Il est essentiel d’être crédible pour ses collaborateurs, de faire preuve d’honnêteté, d’intégrité, de ne jamais transiger sur l’éthique ou le sens moral, de reconnaitre ses erreurs. La crédibilité est mère de la confiance car « – Un manager qui n’est pas cru est cuit ».

L’autre point étant de mesurer aussi l’impact de son management. »

Philippe DETRIE conclu en citant Olof PALME, Premier ministre suédois, « La société doit être exigeante envers les forts et douce envers les faibles », et en affirmant qu’il a l’impression que nos entreprises pratiquent exactement le contraire : elles précarisent les fragiles et font la promotion des gagnants.

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Emmanuel TONIUTTI est Président de l’International Ethics Consulting Group (IECG), il entraîne les directions générales à mettre en œuvre leurs décisions stratégiques en cohérence avec les valeurs humanistes. Il est Docteur en théologie de l’Université Laval au Canada et Professeur de leadership au sein de l’Exécutive Education de HEC Paris, il prépare les futurs dirigeants à une nouvelle vision du monde des affaires.

Son dernier livre, ‘Le leadership de l’amour’ doit se prendre comme une vision du monde, fondée sur sa propre expérience et non comme une ‘vérité vraie’,  sur un thème : ‘Comment essayer de prendre des décisions qui soient cohérentes avec la stratégie de l’entreprise et des valeurs humanistes qui font appel à cette dimension de l’amour’.

‘Le leadership de l’amour’ se présente sous la forme de 4 grands chapitres :

•  Le leader et leader responsable

•  Le courage

•  L’amour

• La mise en pratique du leadership de l’amour.

Le leader et le leader responsable :

Le leader crée de la valeur actionnariale, le leader responsable de la valeur partenariale. Les leaders gèrent leur énergie de façons différentes,  selon trois possibilités :

– Autonomie : il se donne sa propre loi, l’énergie vient de lui-même (Bernard MADOFF : pyramide de Pongi)

– Hétéronomie : l’énergie vient de l’extérieur (Apple, Steve JOBBS « avec l’aide de Dieu »)

– Théonomie : l’énergie vient de soi et de l’extérieur (enthousiasme et charisme).

Il y aussi deux sortes d’éthique : l’éthique déontologique ‘Aime ton prochain comme toi-même et ne fais pas à autrui ce que tu n’aimerais pas que l’on te fasse à toi-même’ et l’éthique conséquentialiste (mesurer les conséquences de ses actes).

Le frein au leadership responsable est le courage.

Le  courage :

Pour Aristote : « c’est le juste équilibre entre la lâcheté et la témérité ». Pour les Grecs, c’est la vaillance, la force et l’énergie de combattre. Le principal frein est l’angoisse et la peur. Il faut mettre à jour cette angoisse (liée à 3 éléments : l’angoisse de l’existence, de l’absurde et de la condamnation),  l’expliciter et identifier ses peurs (il existe 9 peurs : Le conflit, l’imperfection, l’inutilité, l’échec, l’abandon, le vide (affectif), l’autorité, la souffrance et la faiblesse). Pour chaque type de personnalité, une peur domine. Il faut identifier son type de peur. Chaque peur génère des forces sur lesquelles s’appuyer. Confucius a dit : « si tu as un problème et que tu n’as pas de solution, tu es le problème ».

L’amour :

L’amour c’est la violation de l’intégrité de l’autre. Faire entrer l’autre dans son monde. C’est une fusion (éros). L’amitié, c’est le respect de la différence de l’autre (Philia). Toute fusion se transforme en Philia pour un amour durable. Il faut s’aimer soi-même pour aimer les autres : « aime ton prochain comme toi-même ».

Mise en pratique du leadership de l’amour :

Il s’agit de voir dans le visage de l’autre sa propre humanité : création de valeur partenariale par le respect des différences et l’enrichissement via ses différences. Les valeurs restent un concept « littéraire » ; il est important de s’entrainer à vivre les valeurs sous stress car ce n’est pas naturel.

L’entrainement comporte 5 questions :

– Quelles sont nos émotions ?

– Quelles sont les faits ?

– Quels sont les objectifs à atteindre ?

– Quelles sont les parties prenantes ?

– Quel est le plan d’actions ?

Dans l’entrainement, il faut que tout le monde s’exprime et sache dire le négatif. Cela crée le sentiment d’appartenance et de performance.

A l’international, cela se complique ; le grand défi est de traduire les valeurs en termes de comportements. Il faut donner du temps aux équipes, donner ce que l’on a le moins à ceux qui en ont le plus besoin.

Trois facteurs majeurs sont à travailler : l’émotion, l’adaptation et l’hygiène de vie. Sous stress, quatre obsessions apparaissent : l’argent, le pouvoir, la jalousie, le moi.

Semaine de la francophonie oblige !

SONY DSCCette matinée se termine par la présentation d’Odile CANALE, Chef de la mission emploi et diffusion de la langue française au ministère de la culture, du ‘Guide des bonnes pratiques linguistiques dans les entreprises’. Ce guide comprenant 50 bonnes pratiques a été réalisé à partir d’interviews d’entreprises internationales.

C’était un peu une gageure de vouloir associer éthique des entreprises, intelligence économique et manager/leader dans  une vision humaniste, chargée de références historiques.

Ce fut une matinée bien remplie et réussie  avec des interventions très appréciées par l’assistance…